La Corrida : Tradition, Art ou Cruauté ?

La corrida, véritable institution de la culture espagnole, est un spectacle qui suscite des émotions fortes et divise profondément. Pour certains, elle est l’expression d’une tradition ancestrale, un art de vivre incarné dans la danse entre l’homme et l’animal. Pour d’autres, elle est synonyme de sang versé, de souffrance inutile, et de maltraitance animale. À l'heure où les préoccupations éthiques et écologiques occupent une place centrale dans la société, la corrida devient un point de friction entre tradition et modernité.

La corrida trouve ses racines dans l’Espagne du XVIIIe siècle, mais les premières formes de combats de taureaux remontent à l'Antiquité. Aujourd'hui, elle est perçue par ses défenseurs comme une forme d’art qui met en valeur le courage, la maîtrise et l'élégance du torero. Les costumes flamboyants, les pas de danse avec le taureau, et l'habileté avec laquelle le torero manie sa muleta ou son épée sont autant d'éléments qui font de la corrida un spectacle fascinant, parfois comparé à une chorégraphie pleine de grâce et de tension.

Il n’est pas rare que les chiffres associés à la corrida laissent un goût amer. Chaque année, des centaines de taureaux sont tués dans les arènes. Mais ce n’est pas tout : ces animaux subissent des souffrances terribles avant même d’être tués. La plupart des taureaux sont affaiblis avant d’entrer dans l’arène, notamment par des pratiques comme la blessure des narines ou l’utilisation de drogues pour les rendre plus agités et dociles face aux humains. La torture physique et psychologique infligée à ces animaux pendant la corrida est inimaginable.

Les taureaux sont d'abord affrontés par le picador, un cavalier qui les blesse avec une lance pour les épuiser et les affaiblir. Ensuite, viennent les passes de banderilleros, qui plantent des banderilles (des bâtons ornés de harpons) dans le dos du taureau. Enfin, le torero, dans une dernière passe, tue l’animal, souvent après qu'il ait déjà été fortement blessé. 

La corrida n'est pas sans victime, et la question des morts humaines est également un aspect souvent oublié. En dépit des protocoles de sécurité, chaque année, des toreros sont blessés, parfois tués dans l’arène. Bien que ces incidents soient relativement rares, ils rappellent la dangerosité du spectacle, tant pour l’homme que pour l’animal. Le dernier torero tué dans une arène espagnole remonte à 2017, un événement qui a ravivé les débats sur la sécurité et la légitimité de ce spectacle.

Cependant, le nombre de morts animales reste infiniment plus élevé. Chaque année, selon les estimations, ce sont près de 10 000 taureaux qui sont tués dans le cadre des corridas en Espagne. Ces chiffres, en constante augmentation, contrastent avec l’évolution de la société, où de plus en plus de voix s’élèvent contre cette pratique.

Le dilemme actuel de la corrida soulève une question plus large : à quel moment une tradition doit-elle évoluer ou disparaître face à une prise de conscience collective ? La corrida, au-delà de son aspect spectaculaire, est un exemple frappant de cette tension entre respect du patrimoine culturel et éthique moderne.

Et vous, que pensez-vous de la corrida ? Peut-on justifier la souffrance animale au nom de la tradition, ou cette pratique doit-elle disparaître ?