L'équipe d'ATTIRE s'est rendue au défilé de Cyber'Z, qui présentait le mardi 7 mai au soir la nouvelle collection Mental Matrix. Si les applaudissements pour la directrice Zoevsky étaient certains, il faut pouvoir tirer une conclusion spirituelle : la culture de l'ampleur, de l'excès et de l'opulence est un frein à l'art. En quasi transhumaniste, Zoevsky joue des codes de la couture et de la société pour peindre un univers riche et connecté... Qui s'effondre lamentablement au bout de la dixième tenue.

Mental Matrix évoque certainement une reconnexion qui s'est plutôt transformée en une véritable déconnexion : si la colorimétrie se veut plus ou moins cohérente sur l'ensemble du défilé, le choix particulier des vêtements laisse à désirer. Il ne suffit point d'incorporer des éléments technologiques et prétendre que le défilé n'est qu'une altération de la célèbre Matrice parmi tant d'autres... À notre sens, la créatrice Zoevsky maintient encore une fois une gamme qui se veut complètement intemporelle et qui n'est point régie par les codes saisonniers. À vouloir rendre compte d'un univers cybernétique parallèle où Zoevsky peut librement devenir une créatrice talentueuse, elle se perd plutôt dans un enchaînement banal et attendu où ennuyeux accessoires, tops légers et poitrines saillantes se passent le relai. Non, en réalité Mental Matrix est bien plus que ça. C'est la célébration de notre nouvelle génération, d'une génération internétique où chacun devient ce qu'il veut être. Le décor du défilé est absolument enviable : le bleu est un choix pertinent qui pose néanmoins un problème de visibilité des différentes tenues au moment des passages.
Quoiqu'il en soit, cette plongée presque marine entraîne une traversée dans ce monde codé où, dans les frontières de l'Art, Zoevsky se joue Maîtresse de la Création.

Mais en réalité, Mental Matrix ne suit pas une volonté claire et artistique que le monde de la couture attend en fait depuis un long moment. Chaque tenue minutieusement confectionnée reflète de la maîtrise de Zoevsky à délaisser sa propre poétique. Si son défilé était un poème, les tenues présentées seraient toutes des vers libres. Le défilé est sans arrêt coupé par des animations récompensées, et évitons de parler de la performance plus ou moins désirée de Lady Gaga sur scène. Le rythme est saccadé, infernal, à l'image des défilés de la Fashion Week passée. Dans un article récent, le gérant Xander évoquait que le "véritable" RP Mode était en fait un retour à ses sources avec des défilés de vrais mannequins. Posons directement la question : où sont-ils passés ? Peut-être qu'ils n'ont point osé sortir du rideau de la scène, trop humains  et non suffisamment robots, martelant ainsi la trajectoire nouvelle et technologique de Cyber'Z... Entendons, il est bien dommage que cette politique d'authenticité vantée ne soit point respectée au sein de ce défilé. N'entendez pas que nous sommes des personnes superficielles qui ne perçoivent que le négatif. Non, Zoevsky a toujours su être en décalage avec les autres créateurs et créatrices mais il faut avouer que sa créativité, son originalité entraînent un débordement certain qui noie son travail. Et c'est fort dommage. Zoevsky, tu ne devrais point tenter de mimer ce que tu vois : quitte donc cette maxime célèbre, you were born this way  pour suivre ton propre chemin.

Zoevsky... Il est temps pour toi de suivre une voie que tu veux réellement. Une voie de rigueur qui te permet de manier brillamment créativité, authenticité et régularité. Ne nous vois pas tellement pessimistes, prends nos critiques comme des encouragements à dépasser la poésie que tu tisses depuis maintenant plusieurs mois. Nous serons ravis d'assister à ton prochain défilé.

Vanessa Schiffer  pour ATTIRE Magazine.